Cambodge année zéro by François Ponchaud

Cambodge année zéro by François Ponchaud

Auteur:François Ponchaud [Ponchaud, François]
La langue: fra
Format: epub, mobi
Éditeur: Kailash
Publié: 1998-01-23T01:11:31+00:00


Chapitre IX.

LA RÉVOLUTION DES ULTRAS

« Révolution radicale, plus radicale et destinée à mener plus loin que celle de la Chine ou de l’URSS. » C’est le jugement que portait Kaj Bork, ambassadeur suédois au retour d’une visite effectuée au Kampuchéa démocratique, entre le 20 février et le 6 mars 1976. Nous ne pouvons que souscrire à ce jugement : suppression des villes, liquidation radicale des anciens cadres, restructuration complète de la société et de l’économie, refonte de la culture et abolition de toute religion. Sans doute aucune révolution n’a été aussi loin et surtout aussi rapidement dans la réalisation de ses objectifs.

Cette révolution cambodgienne a surpris le monde entier par sa violence : comment les Khmers doux et paisibles en sont-ils arrivés à transformer le pays de la douceur de vivre en un vaste goulag ? Même les Khmers vivant à l’étranger ne comprennent pas : « Nous passions autrefois pour les champions de la corruption, nous voilà devenus à présent les champions de la barbarie ! Permettez donc aux journalistes de se rendre au Cambodge pour prouver que tout ce que l’on raconte de notre patrie n’est pas vrai ! », déclarait, avec des accents pathétiques, M. Son Sann, ancien Premier ministre et ancien directeur de la Banque nationale, au cours d’une émission télévisée à Paris, en juin 1976. Même en minimisant les propos des réfugiés, la vérité demeure terrible : la révolution khmère est l’une des plus sanglantes du XXe siècle.

De nombreux Khmers rejettent sur l’étranger la responsabilité des excès de cette révolution : « Le comportement des révolutionnaires n’est pas khmer ! Il est inspiré par les Vietnamiens qui veulent anéantir notre peuple et affaiblir notre pays pour se l’approprier. » Nous étions proches de les croire, tant les apparences pouvaient leur donner raison. En 1970 nous avions vu maintes fois des soldats Viêtcongs et nord-vietnamiens combattre l’armée républicaine. Au nord de Kompong Cham, j’avais moi-même été arrêté par des Vietcong qui sillonnaient le territoire khmer à quarante kilomètres de la frontière vietnamienne. Le 8 octobre 1972, nous avions pu voir les cadavres de quatre-vingt-cinq commandos vietnamiens abandonnés à Phnom Penh après l’attaque du grand pont de la capitale. Ces mêmes Vietnamiens étaient encore présents en avril 1975 sur la rive est du Mékong, où de nombreux réfugiés les avaient vus.

Cependant, au fil des mois, il fallut bien admettre que les révolutionnaires vietnamiens étaient bel et bien retournés chez eux. Plusieurs témoignages nous en donnèrent la preuve.

Les Vietnamiens du Cambodge ont eu la possibilité de rejoindre leur pays d’origine dès le début juin 1975. A Chmacar Leu, par exemple, un officier « giai phong » (FNL du Sud-Vietnam) est venu le 3 juin 1970 dire à la population : « Les trois peuples du Vietnam, du Cambodge et du Laos, sont frères. Si les Vietnamiens veulent retourner dans leur patrie, ils le peuvent. » Plusieurs phnom-penhois se sont fait passer pour Vietnamiens et sont partis, dès le 6 juin, pour le Vietnam. Chemin faisant, ils ont rencontré



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